I cry for you get up !

STOMP FOR MORE BANG FOR MORE

« Le désir est sensuel, une manifestation du libre choix ; l'attachement, au contraire, est l'ennemi du libre choix. »

- Toni Bentley

Les moments de détente, les vrais, les durs, sont rares à Farway Hill c’est pourquoi chaque habitant en profite pour faire ce qui lui plait vraiment. Pour Shizuka, s’enfermer quelque part et écouter de la musique à fond sans personne pour venir le déranger. Evidemment, ici, difficile de trouver un endroit un peu reclus pour s’enfermer, entendre avec plaisir la serrure tourner et pouvoir pousser le volume du casque à fond et danser, chanter sans s’écouter ni être écouté. Du coup, à défaut de trouver mieux, il a soigneusement fermé la porte du salon vide, muni de son iPod et du casque noir, et est allé se poster près de la fenêtre qu’il a légèrement ouverte. Après avoir posé le casque sur ses oreilles, il a allumé le petit bijou de technologie et a poussé le son à fond pour ensuite, ensuite seulement, choisir une chanson. Le son lui envahit les tympans et lui fait un instant voir trente-six chandelles. Mais c’est tellement bon. Tant pis si on l’appelle pour se rendre au confessionnal. Cela pourra attendre. Il commence à se déhancher au rythme endiablé de la musique, chantant à tue-tête.

SHIZUKA - Go away, nothing keeps you heeere ! A new day ! Don’t you look back ! Look out ! All cleaaaaaaaaaar ! Now get on !

Il se dépense en dansant, sautant et chantant. Il crie plus qu’il ne chante à ce moment-là. Exactement comme quand il faisait de petits concerts avant son groupe à New York. C’était un des reproches qu’on le faisait le plus souvent. Dans ces moments, sa voix devient plus rauque et sombre. « On dirait un démon qui chante » lui a dit un jour son meilleur ami. C’est ce qui lui plait justement. Plaisait. Car depuis qu’ils se sont plus ou moins disputer, ils ne se parlent plus. Et comme Stan était le bassiste et occasionnellement le leader, le groupe stagne. On peut même dire qu’il redescend la pente. Repenser au fait qu’ils allaient signer dans une maison de disque major, cela le met toujours dans des colères monstrueuses.

SHIZUKA - Do you see meee ? Hello, hello ! I cry for you, get up ! Get up ! Get u-

Il fait demi-tour, dansant toujours, et au moment de se retrouver face à la porte, il s’immobilise, le bras en l’air, sur une jambe. Le garçon qui le regarde bizarrement, sur le pas de la porte, il fait partie de son imagination débordante ou il est bien réel ? Il reste un petit instant dans cette position un peu étriquée, la bouche ouverte en plus. Finalement, il baisse le bras, pose le pied par terre et ferme la bouche. Ça y est. C’est terminé. Sa réputation est foutue. Il se fiche royalement que les gens devant leurs postes de télévision aient pu le voir. C’est sa réputation au sein du groupe qui est en jeu. Il déglutit difficilement et sourit d’un air gêné. Il sent ses joues s’embraser. Avec son teint pâle, ce n’est vraiment pas du jeu. Il porte une main à sa joue. Elle est effectivement brûlante. Il en profite pour dévisager ce garçon qui lui fait face. Et, nom d’un chien, comme il est grand. Même de là où il est, Shizuka doit lever un peu la tête pour le regarder dans les yeux. Il aime bien ses jolis yeux verts, ou bleu mais il n’y voit pas assez pour le dire. C’est cet instant-là qu’à trouver une de ses mèches oxydées pour tomber devant ses yeux, le sortant ainsi de sa rêverie. La replaçant derrière une oreille, il retire son casque et le laisse retomber sur sa nuque.

SHIZUKA - D-désolé… Hum… Pfou il fait chaud !

Il transpire un peu. Filant vers la fenêtre, il l’ouvre en grand et inspire longuement, espérant ainsi faire disparaître les rougeurs de ses joues. Et il entend la fin de la chanson. « Kick you out the door if you don’t move on ». Et le début d’une autre. « Bang on, stomp everybody ». Finalement, il se retourne vers le garçon et lui sourit, un peu plus assuré à présent qu’il a repris contenance.

SHIZUKA - ‘Scuse pour le spectacle. T’es là depuis longtemps ?

L'envie se faisait de plus en plus opressante et depuis qu'il avait quitté Olivia, Denver se sentait de plus en plus mal. Aussi fallait-il être crétin pour oser refuser la compagnie d'une charmante jeune femme pour se retrouver seul, à miroiter sur des choses dont on devait apprendre à se passer. C'était stupide de sa part que de se penser suffisamment fort pour affronter ses craintes et son stress tout seul. Il avait toujours été question que de ça finalement ! Vouloir se montrer plus fort que les plus forts, plus malins que les plus malins d'entre nous et surtout plus courageux que les autres, plus téméraire. Denver avait passé son temps à tenter de prouver au monde entier que non seulement il méritait sa place en tant qu'Homme mais qu'il la méritait bien plus que les autres. Depuis le décès des deux seules femmes de sa vie, il avait appris à cacher sa peine et sa colère dans ce qu'il appelait des addictions simples. Il est clair que le jeune Amaury était encore loin de se piquer au point de ne plus se souvenir où il vivait et avec qui il était, mais la drogue avait déjà pris une place prépondérante dans son existence. Le pire ? C'était qu'il n'avait rien vu venir. Il connaissait déjà la sensation de légèreté que pouvait lui provoquer ce genre d'échapatoir, il savait aussi qu'il ne pouvait pas se sentir mal lorsqu'il était sous l'influence d'une drogue ou de l'alcool, il était déjà passé par là. Pourtant, ELLE l'avait sauvé... Elle seule avait su trouver les mots justes pour calmer ses maux, calmer ses douleurs. Né d'un viol, il avait perdu toute foie en l'être humain jusqu'à ce que son regard se porte sur les minces épaules d'Elisabeth, que ses mains témoignent d'affection envers se corps si frêle et fragile et que ses lèvres n'aient d'yeux que pour les formes saillantes de cette chétive silhouette. Tout avait pris sens lorsqu'elle avait finalement décidé de s'abandonner à lui, de se seuvrer de ses mots et de ses connaissances tout en lui donnant tout ce qu'elle avait. Un partage sans failles et sans craintes qui les avait conduit tout bonnement à un amour platonique, aussi clair que du cristal et aussi pure que de la glace. Ils avaient eu confiance l'un envers l'autre comme jamais ils auraient pu l'avoir et puis tout c'est rapidement éteint. On dit qu'il suffit d'une brise pour éteindre une flamme, d'un seul battement d'aile d'un papillon pour faire naître la pire des tempêtes à l'autre bout du monde... On dit aussi que d'un amour aussi intense et fort ne peut naître que des cendres et pourtant. Aurait-il pu y croire plus qu'il n'y avait cru ? Impensable. Mais aujourd'hui, tout n'était plus que lourds souvenirs et dures souffrances. En descendant les marches du perron, il secoua son visage en soupirant.

— Imbécile !

Toujours vêtu de ses habits simples, il avait glissé ses mains dans les poches de son blaser en avançant dans le couloir qui menait à l'entrée. L'envie de fumer était de plus en plus brûlante et chacun de ses pas semblait l'écorcher un peu plus. Pourtant, avant même qu'il n'ait eu le temps de céder à cette irresistible tentation, une voix l'interpela. Un son aigüe qui semblait venir d'ailleurs, d'une pièce fermée. Un râle qui n'avait rien d'humain semblait s'échapper d'une porte close au fond de ce même couloir. Intrigué, il concentra son esprit sur cette interrogation et tâcha d'en oublier son paquet de malboro coincé dans l'étreinte de sa main, toujours glissée dans la poche de son blaser. Il avança de quelque pas, puis s'arrêta net. Le râle prenait consistance et tout à coup, il reconnu la voix d'un homme. Soupirant, il fut prêt à faire demi-tour lorsqu'il perçu des bruits bizarre accompagnant la voix cristalline d'un homme qui semblait encore très jeune, ou castré >.< ! Ses pas l'emmenèrent vers la porte de bois et son oreille se cala contre celle-ci, humide et fraîche. Il semblait y avoir de l'action à l'intérieur de cette pièce et Denver n'aurait su préciser si l'origine de ces bruits étaient dûs à une bagarre où simplement à une sorte de petite fête improvisée. Ce qui le mit sur le chemin de la première option fut simplement la déduction du fait qu'il n'y avait qu'un homme dans cette pièce, c'était toujours la même voix qui y résonnait. Mais ce qui le faisait douter d'une scène violente résidait dans le fait que cette voix n'hurlait pas à l'aide, mais semblait chanter des paroles d'un air assez connu. Au sommet de sa curiosité, Denver poussa l'étroite porte et un spectacle des plus surprenant lui sauta aux yeux... Un jeune garçon au physique androgyne semblait s'éclater au rythme d'une chanson dont Denver ignorait jusqu'à l'existence. Un tableau assez amusant d'un garçon qui n'avait pas l'air de se poser trop de question et qui ne jouait aucun rôle. Amaury avait en face de lui une personne complètement naturel surpris en plein délire. Il n'y avait aucun mal à ça et d'ailleurs Denver trouvait ça plutôt positif. Shizuka avait l'air d'être quelqu'un de passionné et de franc, pas une de ces pâles copies de starlette du showbiz qui tente de marquer des points auprès du publique en jouant le rôle du mauvais garçon, bien au contraire. Il avait instinctivement senti que Shizuka était un garçon simple, qui ne se posait aucune question et qui avait l'air plutôt déjanté. Que des bons points, surtout quand on connaissait Denver et son lourd passé !

Shiz' s'arrêta net. Dès qu'il vit Amaury ! L'expression figée sur son visage fit sourire Amaury. Il se retint même de rire, pour vous dire. Tout à coup, il semblait avoir oublié jusqu'à même l'existence du paquet de cigarette qu'il serrait pourtant encore dans sa main, à l'intérieur de la poche de son blaser. Distinctement, des deux, c'était le jeune éphèbe blond qui était le plus mal à l'aise, d'ailleurs, quand celui-ci bégaya « SHIZUKA - D-désolé… Hum… Pfou il fait chaud ! », Denver ne put réprimer un petit rire qu'il dissimula derrière un toussotement poli. Il s'avança de quelque pas jusqu'à toucher le premier sofa qu'il caressa du bout des doigts. Son regard plongé dans celui de Shiz' et s'arrêta alors lorsque ce dernier ouvrit la fenêtre. Discrètement, il détailla son anatomie. Une corpulence fine, un look hors du commun et une tenue plutôt androgyne, Denver ne lui trouva rien de bien attirant sinon cette espèce de tristesse et de mélancolie qu'il parvint à lire dans ses yeux lorsque ce dernier se retourna vers lui. Non pas que Shizuka soit spécialement vilain mais ce dernier n'avait rien d'un bel appolon, au contraire, il se détaillait justement par sa silhouette chétive et sa chevelure d'un blond impressionnant. Un charme certain, sur, mais neutre. Lorsqu'il posa son regard bleu azur (j'espère >.<) dans celui de Denver, ce dernier ne put réprimer un frisson d'étonnement. Il y avait encore sur son visage la même expression mal à l'aise qu'il avait eu lorsqu'il comprit qu'il avait été observé pendant son délire. « SHIZUKA - ‘Scuse pour le spectacle. T’es là depuis longtemps ? ». La voix intimidée, Shizuka venait de s'exprimer pour la seconde fois. Souriant d'avantage, Denver croisa les bras sur sa poitrine, oubliant alors complètement son paquet de cigarette et tenta d'afficher un air plus ou moins amical, pour ne pas l'effrayer. Puis, sur un ton délicat, il lui répondit presque instinctivement.

— Ne t'excuse pas, t'as le droit. J'aime les gens qui restent eux-mêmes et qui n'hésitent pas à délirer, même si tout le pays les regarde.

Puis il s'avança d'avantage et tendi sa main vers celle de Shiz'

— Denver... Enfin, tout le monde m'appelle par mon deuxième prénom alors... Amaury :)

STOMP FOR MORE BANG FOR MORE

SHIZUKA -

Denver. Je préfère Denver. Et moi c’est Shizuka.

SHIZUKA -

C’est bizarre comme prénom, Amaury. Très bizarre.

SHIZUKA -

J’te dérange ? T’avais un truc à faire ? J’peux partir si tu veux.